L’Etoile d’Alger

von

Noir et ample, un voile couvre la face du ciel, masque sévère sur les yeux du soleil, les atours d’Alger ont disparu. L’horizon aussi a disparu.
Cité Mer et Soleil, la voiture de Djelloul s’arrête devant le bâtiment C, Moussa descend en baîllant. Il claque et reclaque la portière, puis ils se séparent d’un simple geste.
Cloaque boueux devant l’entrée du bâtiment, Moussa soulève les pans de son pantalon, slalom souple entre les flaques, hop. Il en rate une, les beaux souliers vernis plongent. En maugréant, il sort un petit mouchoir blanc, crache dessus et nettoie les taches. Le hall d’entrée de l’immeuble est dévasté.
Moussa se dirige vers les escaliers, mort de fatigue.
La cité se réveille, faces renfrognées, toux sèches. Saliha, Kahina et Mohand doivent être partis au boulot, Nacéra et Ouardia à la fac, Papa dévore la page politique du journal en pestant, comme toujours, contre le gouvernement. Maman prend ses médicaments pour la tension et son diabète. Z’hor doit faire la lessive, le ménage. Ses gamines, Maya et Fella, jouent au balcon. Sahnoun, chômeur-simple, doit encore dormir. Et Slimane, chômeur-islamiste, sûrement à la mosquée, lui, avec les barbus. Cage 9, escalier F, 5° étage, palier A, nº 35. Éreinté, Moussa ouvre doucement.
Quatorze personnes dans trois pièces. Moussa se déshabille, puis se jette sur son matelas et sombre dans le sommeil.